Pour Olivier Cloarec, président exécutif et directeur général du Stade rennais, le derby breton entre Lorient et Rennes, ce vendredi (21h, 20e journée de L1) est l’occasion de revenir dans l’un des nombreux clubs où il est passé depuis 25 ans. Portrait d’un passionné à sa façon.
Dans quelques semaines Olivier Cloarec, président du Stade rennais, fêtera ses 50 ans dont la moitié passée dans le milieu du football à tous les postes et dans de nombreux clubs. Si le changement de dizaine sera soir de fête et que certains le surnomment "Cloclo" une chose est sûre: on ne le verra pas danser sur les tables. L’homme est de nature discrète mais surtout efficace. "Il est très sérieux, très consciencieux, confie Michel Jestin, ancien président de Brest et Vannes qui a travaillé dix années avec lui dans ces deux clubs. C’est un homme de confiance." "Il m’a appelé un matin à 5h40, raconte Olivier Cloarec. Il m’a dit: 'si je rachète Vannes est-ce que tu me suis?'"
Responsable du marketing au Stade brestois le finistérien est alors nommé directeur général du club morbihannais, "mais on était six salariés et 200 bénévoles pour faire tourner la boutique". Nous sommes en 2008. Le VOC passe de National en Ligue 2 et se retrouve un an plus tard à la surprise générale en finale de coupe de la Ligue face au Bordeaux de Yoann Gourcuff pour une punition 4-0. Mais l’essentiel est ailleurs, "dans les aventures humaines", se souvient Cloarec. "Les accolades, les regards, la joie dans le vestiaire après la victoire en demi-finale à Nice (1-1, 4 tab 3) m’ont plus marqué, ajoute-t-il. Et surtout la saison suivante lors du maintien à Metz qui du coup rate la montée en Ligue 1 dans un stade Saint-Symphorien à guichets fermés."
On a repeint la tribune de Francis Le Blé ensemble
A Vannes, le bureau est un Algeco où le chauffage fait parfois la grève. Les premiers mois, il n’y a pas de laverie pour les maillots des joueurs dont certains comme Pascal Delhommeau ont connu la Ligue des champions. L’heure est à la débrouille. "Il a baroudé, souligne Michel Jestin. Il a une vraie expérience et connaît le foot. Je suis fier et heureux pour lui qu’il soit aujourd’hui à ce poste." Quinze ans plus tard, le quotidien et les réalités économiques sont forcément différents pour ce père de trois garçons qui échange 5-6 fois par jour avec François Pinault, actionnaire des Rouge et Noir.
Le plaisir d’évoquer le parcours du président du Stade rennais arrivé de Dijon il y a deux ans est le même chez Pascal Robert, directeur général du Stade brestois, avec qui il a travaillé de 2004 à 2008. "Il est président de Rennes aujourd’hui ce n'est pas rien mais je suis sûr qu'il n'a pas oublié qu'à l'époque on avait repeint nous-même avec nos pinceaux la tribune VIP du stade Francis Le Blé pour qu'elle ressemble à quelque-chose. On faisait vraiment tout."
De stagiaire à président
La main à la pâte, une habitude naturelle pour ce petit-fils de boulanger: "Olivier il a les vraies valeurs, poursuit Pascal Robert. Il est apprécié de tous et surtout il ne change pas alors qu'il pourrait prendre le cigare. Mais s’il est là où il est, ce n'est pas du hasard. C'est aussi qu'il sait faire. C'est un gros bosseur." Même s’il ne parle pas beaucoup, ses multiples expériences s’accompagnent d’un lot d’anecdotes qu’il distille avec parcimonie. Olivier Cloarec a connu presque tous les postes dans le milieu professionnel et même évolué sur le carré vert. "Je ne vais pas vous raconter que je n’ai pas été joueur pro à cause d’une grave blessure comme certains, sourit-il. Mais je jouais à l’hermine concarnoise en DHR et PH jusqu’au jour où je me suis fait une double fracture à six semaines de mon mariage!" Après la noce en béquille, l’avenir s’écrira en coulisse et au bord des terrains.
C’est par un moment-clé, provoqué, que le Breton exilé à Strasbourg pour ses études va découvrir le foot pro. "Après un DESS de droit je devais réaliser un stage dans le cadre de mon Master de marketing et gestion du sport. Personne n’avait encore réussi à le réaliser au Racing. Je me suis mis ce défi mais je n’ai jamais eu de réponse. Je me suis donc déplacé au siège du club et à l’accueil je suis tombé sur Claude Le Roy qui m’a dit: ‘Cloarec c’est breton, qu’est-ce que vous venez faire ici?’" On ne saura jamais si le sorcier blond aura pesé dans la décision mais l’étudiant est embauché pour six mois comme stagiaire. Il y restera jusqu’en 2004, date à laquelle il traverse la France pour se poser à Brest aux côtés du président Jestin. Merchandising, billetterie, communication… le natif de Pont-l’Abbé connaît le terrain ce qui lui permet de parler le même langage que bon nombre de salariés au Stade rennais.
C'est une référence en France à son poste
"Olivier est méthodique et très calme, témoigne Loïc Désiré, responsable recrutement du Racing Club de Strasbourg qui a connu Cloarec à Vannes et dont il est désormais un ami proche. Il n'a pas besoin d'élever la voix pour se faire entendre. Il dit lui-même qu'il n'aime pas le conflit mais vous imaginez bien qu'à son poste dans un grand club comme Rennes, il en gère tous les jours. Dans la discrétion sans que çà sorte. Il aime le foot, c’est un vrai passionné qui en connait toutes les ficelles et je peux vous dire que c'est en matière de transfert, un fin négociateur. Il n’est pas du tout carriériste mais de par ses multiples expériences dans tous les domaines d'un club, pour moi c'est une référence en France à son poste."
Lui n’imaginait pas une telle destinée. "Je n’ai jamais rêvé d’être président et ce n’est pas un aboutissement mais je ne pouvais pas refuser une deuxième fois une sollicitation du Stade rennais", confie-t-il. C’est la première raison pour laquelle il a répondu favorablement à la demande de Nicolas Holveck au début de l’année 2021. La seconde c’est la Bretagne. Très attaché à ses racines, Olivier Cloarec est passé par Guingamp comme stagiaire, Brest, Vannes, Lorient et désormais Rennes. Il ne lui manque plus que Nantes pour être complet. Mais aujourd’hui son cœur ne balancera pas. "Je suis rennais à 100 %, sans ambiguïté", assure-t-il.
Pascal Robert espère qu’il reste une petite place pour le Finistère. "Il est à Rennes mais il a toujours du sang qui coule pour Brest je pense. Brest-Rennes, ce sera la dernière journée. J'espère qu'ils seront déjà en Coupe d'Europe et nous déjà sauvés pour que les retrouvailles soient plus tranquilles." La conclusion d’une saison qui avait débuté par une défaite de Rennes à domicile (0-1) face à de surprenants Lorientais. Ce vendredi soir au Moustoir il y aura comme un air de revanche, et un peu de stress pour le président Cloarec.