Nemanja Matic (35 ans), recrue phare du Stade Rennais cet été, a accordé sa première interview à RMC Sport quelques heures avant ses débuts en Ligue Europa avec le club breton, ce jeudi face au Maccabi Haïfa.
Il est la recrue la plus attendue du mercato rennais et le joueur d'envergure recherché depuis plusieurs saisons par le club pour passer un cap. Alors que la Coupe d'Europe reprend ses droits ce jeudi au Roazhon Park (face au Maccabi Haïfa en Ligue Europa, 18h45, sur RMC Sport 1) pour la sixième saison saison de suite, Nemanja Matic a accordé un grand entretien à RMC Sport.
A 35 ans, le Serbe s'acclimate petit à petit à la France et à sa nouvelle vie rennaise. L’ancien milieu de terrain de Chelsea, Manchester ou de l’AS Roma qui va débuter dans quelques semaines les cours particuliers de français, livre son avis sur son début de saison mitigé comme celui de son équipe et sur ses ambitions avec le club breton. Non, il n'est pas venu en pré-retraite et voit le Stade Rennais capable de viser haut.
Bonjour Nemanja, merci d'être avec nous.
Bonjour. Ça va? (en français)
Vous êtes arrivé à Rennes il y a un mois. Vous avez joué déjà 4 matchs. Première question simple: comment allez-vous?
Je me sens bien. Je m'adapte doucement à ma nouvelle équipe, mon nouveau club. Je pense que tout va dans la bonne direction. Je suis content.
Comment vous sentez-vous dans votre nouvel environnement et ce nouveau pays?
Je me sens bien. Tout le monde est vraiment sympa avec moi et ma famille et essaie de nous aider. Ils nous ont très bien accueillis.
Vous avez vécu dans des grandes villes, Londres, Manchester, Rome...
(Il coupe) Manchester n'est pas une grande ville (rires).
C'est une ville plus grande que Rennes. Ce doit être un sacré changement?
Oui c'est vrai mais je suis heureux ici. Rennes n'est pas une grande ville mais c'est facile d'y vivre. Tout est à 10-15 minutes. Peu importe ce que tu veux faire, tout est proche. Je pense que c'est un endroit parfait pour moi.
Un match sur le banc à Lens quelques jours après votre arrivée puis vous avez toujours été dans le onze titulaire depuis. Vous êtes devenu immédiatement un joueur-clé, non?
Un joueur-clé je ne sais pas. Je veux juste aider l'équipe. Je sens la confiance du coach, du staff et des joueurs. Je dois encore m'améliorer bien sûr. Je suis encore en adaptation. Je veux mieux jouer. Je travaille dur tous les jours.
Que pensez-vous de vos débuts?
Je pense que physiquement je me sens bien. Mais comme je l'ai dit je pense que je peux jouer beaucoup mieux que ce que j'ai fait les deux derniers matchs (à Brest 0-0 et face à Lille 2-2, ndlr). Je ne dis pas que j'ai mal joué mais je peux jouer mieux. Je pense qu'on peut s'attendre à mieux de moi.
Et vous n'avez pas gagné un seul match pour l'instant?
(Rires) Oui que des nuls... En tant qu'équipe, on doit s'améliorer sur plusieurs points. Je pense qu'on a de la qualité pour faire bien plus. Tout le monde sait qu'on a une équipe jeune donc c'est normal que l'équipe ait des absences mais je pense qu'on a un gros potentiel.
Que pensez-vous des débuts de votre équipe, de la façon dont elle joue?
Je pense qu'on a de bonnes idées de jeu. On sait la façon dont on veut jouer mais ce n'est pas facile de toujours être dans le contrôle du jeu, de toujours presser haut et c'est à ça qu'on doit travailler tous les jours pour voir où on fait des erreurs et ne pas les répéter. L'équipe progresse étape par étape et comme je l'ai dit avec beaucoup de jeunes joueurs, c'est normal qu'il y ait une telle évolution.
"On doit apprendre à gagner le match 1-0"
Rennes est normalement une équipe qui aime attaquer, marquer beaucoup de buts. L'équipe semble en difficulté offensivement notamment sur les deux derniers matchs?
Nous avons fait 0-0 et 2-2...
Avec très peu d'occasions dans chacun de ces deux matchs?
C'est le foot. Quand vous jouez à l'extérieur contre une équipe comme Brest, ce n'est pas facile. C'est déjà important dans les matchs de ne pas concéder de but. Parfois vous gagnez un match avec une opportunité de marquer un but et une seule suffit. Pour moi, c'est à chaque fois un bon point qui a montré qu'on pouvait aussi bien défendre. Bien sûr, on a tellement de joueurs talentueux qui veulent toujours marquer, faire des différences mais parfois vous pouvez ou devez gagner le match 1-0 et on doit apprendre ça.
Il y a beaucoup de nouveaux joueurs dans l'équipe vous y compris (Blas, Le Fée, Rieder, Yildirim). Votre entraineur Bruno Genesio disait après le nul face à Lille qu'il y avait beaucoup de travail à faire pour bien jouer tous ensemble. Quel est l'élément sur lequel selon vous l'équipe doit progresser le plus?
(Il prend son temps) Je pense que l'équipe doit être plus patiente avec le ballon. On dirait que nous voulons marquer sur chaque action ce qui est objectivement impossible. Parfois, nous voulons finir les actions le plus tôt possible. C'est normal pour une équipe comme la nôtre avec des joueurs de 18, 19, 20 ans. Comme je l'ai déjà dit, avec un peu de temps, nous serons meilleur, de mieux en mieux à chaque moment du match.
Vous découvrez également la France. Que pensez-vous après un mois du championnat de France et du niveau de la Ligue 1?
La Ligue 1 me rappelle la Premier League...
Vraiment?
Oui car je trouve que toutes les équipes sont assez similaires en termes de qualité et tout le monde peut battre tout le monde. Le rythme du match est d'un haut niveau donc si je devais comparer ce serait avec la Premier League oui.
Ce niveau vous surprend?
Non car bien sûr j'avais déjà regardé certains matchs. Ce n'est pas une surprise pour moi. Et aujourd'hui dans le foot, vous ne pouvez pas être surpris. C'est tellement facile de regarder les matchs.
Vous touchez beaucoup de ballons à chaque match, par exemple 112 face au Havre (2-2 le 27 août). C'est énorme pour un joueur de Rennes ces dernières saisons. Quelles sont les consignes de votre entraineur Bruno Genesio? Que vous demande t-il sur le terrain?
Ça dépend du type de match et de l'adversaire. Si je suis milieu défensif je dois aider mes défenseurs à faire la balance entre la défense, le milieu et nos attaquants. Parfois, je dois faire attention aux milieux adverses. Je connais mon boulot, ce que je dois faire et je m'adapte. Le coach avant le match me dit exactement ce qu'il attend de moi. Mais je ne peux pas tout vous dire dans le détail (rires). Parfois, il faut garder certaines choses secrètes.
Le club et Bruno Genesio attendent de vous que vous soyez un des leaders de l'équipe et un guide pour les autres joueurs. Est-ce déjà le cas? Prenez-vous la parole dans le vestiaire et sur le terrain?
Pour le moment non car je ne parle pas très bien le français (sourires). Mais bien sûr petit à petit, j'essaie d'aider les jeunes joueurs quand je sens qu'ils ont besoin de conseils. Et je vais continuer à le faire de plus en plus. Je pense que je pourrais beaucoup les aider avec mon expérience.
Nemanja, vous savez que vous voir signer à Rennes a été inattendu. Vous êtes le joueur avec la plus grande carrière à rejoindre le club. Passé de Londres, Manchester, Rome à Rennes... Comprenez-vous que ce soit encore une surprise de vous voir là?
Oui je comprends mais pour être honnête, je pense que le club devrait continuer dans cette voie. Dans le futur, continuer d'attirer des joueurs avec "de grands noms", des grands palmarès, pour qu'attirer ces joueurs ne soit plus une surprise pour les supporteurs. Je comprends mais le projet du club et le travail qu'il fait tous les jours avec les jeunes joueurs sur le terrain est la bonne route. Je pense que dans le futur, beaucoup de grands joueurs reconnaitront ça et voudront nous rejoindre.
Qu'est-ce que serait une bonne saison pour vous avec Rennes?
C'est difficile à dire. Je n'aime pas faire de prédictions. Je dis toujours que le match qui arrive est le plus important de ma carrière donc on doit se concentrer là-dessus. Etape par étape et on verra ce que nous sommes capable de faire. Je suis sûr que cette équipe n'a pas de limite car je vois beaucoup de qualités. Je ne veux pas mettre une sorte de pression sur ces joueurs mais ils doivent comprendre qu'ils ont des qualités et qu'on peut battre n'importe qui.
"Bien sûr que j'ai encore faim"
Vous avez 35 ans. Vous avez gagné de grands trophées dans votre carrière. A votre arrivée, on pouvait se demander si vous aviez encore faim?
Bien sûr. Dans le football, je ne m'arrête jamais sur le passé. Il n'existe pas pour moi. Comme je l'ai dit, le match suivant est le match le plus important de ma vie. Le passé reste dans le musée et j'ai bien sûr faim d'aller chercher encore plus. Mon prochain objectif est très important pour moi et je veux faire de bonnes choses avec Rennes.
Vous n'êtes pas venu à Rennes en pré-retraite?
Non non non! Je me vois jouer encore trois quatre ans.
C'est une semaine importante pour le club avec le retour de la Coupe d'Europe. Savez-vous que vous avez joué à vous seul plus de matchs européens que le club de Rennes dans son histoire? Rennes a joué 87 matchs européens et vous 93.
Oh... ok. Je pense que le club en jouera plus que moi très vite comme j'arrêterai dans trois, quatre ans et que le club je suis sûr lui continuera d'aller en Europe. Comme je l'ai dit, le club va continuer à grandir et je crois que dans trois, quatre ans, il sera à un top niveau.
Vous avez notamment été recruté pour aider le club à passer un palier en Europe? Etes-vous conscient de ça?
Comme je l'ai dit, je ferai de mon mieux pour aider l'équipe. Et on verra. C'est dur de dire depuis cette chaise ce qui va se passer en Europa League. Mais je peux promettre que moi et mes coéquipiers donneront le meilleur.
En quoi pouvez-vous aider l'équipe à être meilleure dans ces matchs de Coupe d'Europe?
De part mon expérience, je dois m'adapter et si je peux aider l'équipe à être ne serait-ce que 1% meilleure que la saison dernière ce sera positif. On verra. Je crois en mes qualités et je pense que je serai à mon vrai niveau très bientôt.
Votre calme peut-il aider pendant ces matchs européens souvent chaud?
Oui mais tous les joueurs ont leur qualité qu'ils peuvent mettre sur le terrain et quand vous pouvez connecter tout le monde, c'est un progrès car le football n'est pas un sport individuel. Vous ne pouvez pas jouer tout seul. Vous devez vous adapter pour l'équipe.
Les matchs de Coupe d'Europe sont-ils les plus excitants à jouer?
Oui ce sont des matchs que l'on attend. Mais pour être honnête quand je jouais en Premier League, tous les matchs étaient durs comme des matchs de Ligue des Champions. Et parfois l'opposition était plus difficile en Premier League qu'en Ligue des Champions. Mais en Europe League, Ligue des Champions, ce sont toujours des matchs différents avec une énergie différente que les gens ont envie de voir.
Vous avez joué 93 matchs en Ligue des Champions ou Europa League. Quel serait votre meilleur souvenir?
Question difficile... Il y a beaucoup de matchs. J'ai joué deux finales ou trois (rires). Ce ne sont pas des bons souvenirs. La première avec Benfica, on avait perdu à la dernière minute 2-1 contre Chelsea (15 mai 2013 but de Ivanovic à la 93e). Dans une autre, on perd aux tirs au but contre Seville (avec l'AS Roma le 31 mai 2023, 0-0, 5 t.a.b. 2). Mais c'étaient aussi de très belles expériences. Ce n'est pas facile d'atteindre une finale européenne. Avant et pendant le match, l'atmosphère, l'ambiance est superbe. Les gens sont heureux. Plein de gens t'appellent pour avoir des places pour pouvoir voir la finale. C'est un grand moment à vivre et j'espère que je pourrai revivre çà.
Vous avez perdu une 3e finale je crois, désolé Nemanja. Est-ce dur à encaisser?
Oui mais deux que j'ai jouées. Attendez (il réfléchit). La finale avec Manchester contre Villarreal, je ne la joue pas je crois non? Je ne sais plus (rires). Je ne peux pas tout me rappeler. Il y a trop de matchs (défaite le 26 mai 2021, 1-1, 12 t.a.b. 11, il est resté effectivement sur le banc toute la rencontre). Mais oui c'est dur à vivre. C'est le foot. C'est dur de perdre une finale mais il faut toujours regarder devant pour aller chercher le prochain objectif.
Pensez-vous que Rennes puisse avoir de grandes ambitions cette saison en Europe?
Et pourquoi pas!
Vivre une 4e finale avec le Stade Rennais parait dur à imaginer, non?
Si vous le dîtes OK! Mais comme je l'ai dit, on va y aller étape par étape, match après match et on ne sait jamais ce qui peut se passer mais je crois qu'on a de grandes qualités.