Le groupe espagnol est désormais entre les mains d'un mandataire ad hoc, avec l'objectif de trouver une solution sur les paiements à la LFP. Une situation explosive pour le football français.
Nouveau rebondissement dans l'affaire Mediapro qui fait trembler l'univers du football français. Alors que le groupe espagnol tente de renégocier à la baisse le montant des droits télé du championnat entre clubs tricolores (80 % des matchs sont diffusés sur sa chaîne Téléfoot) , dont il doit s'acquitter auprès de la Ligue professionnelle de football (LFP) - 780 millions d'euros par an pour la Ligue 1 et 34 millions pour la Ligue 2 -, il vient de se mettre sous la protection d'un mandataire ad hoc rattaché au tribunal de commerce de Nanterre, selon nos sources confirmant les révélations du « Canard enchaîné ».
Avec les autres parties prenantes dans le dossier - la LFP aurait accepté cette médiation -, l'idée va être de trouver une solution à ses difficultés financières.
Délai de paiement
Il y a un peu plus d'une semaine, le propriétaire de la chaîne Téléfoot avait provoqué la stupeur en demandant du temps pour régler l'échéance de 172 millions d'euros qu'il aurait dû théoriquement verser le 6 octobre à la LFP et dont il ne s'est toujours pas acquitté. Un délai de paiement refusé ensuite par les clubs français de football, dont la santé financière est déjà grandement fragilisée par la crise sanitaire.
La Ligue est prise en tenaille. Car les clubs lui réclament l'argent dont la source devait être les échéances payées par Mediapro. Il s'agit de 7 millions par club pour la seule échéance d'octobre, la prochaine intervenant en décembre. La LFP aurait communiqué aux clubs qu'elle allait convoquer un conseil d'administration rapidement pour décider d'un emprunt et ensuite organiser une assemblée générale pour le faire approuver.
De l'autre côté, Mediapro, qui a généré 1,8 milliard de revenus et 224 millions de résultat d'exploitation en 2019, reconnaît avec cette procédure qu'il est en difficulté. Les agences de notation S&P et Moody's ont toutes deux abaissé leur notation sur Joye Media, maison mère de Mediapro, au printemps. Beaucoup doutent qu'on puisse forcer son actionnaire à 53 %, le chinois Orient Hontai Capital, à se substituer à Mediapro pour payer la LFP.
Crise sanitaire
La Ligue a des arguments à faire valoir durant cette procédure. Même si Téléfoot a déçu pour son lancement, il n'a jamais été question que la chaîne génère assez de revenus pour ses premières échéances : pour celles-ci, il devait bien avoir prévu des réserves de liquidités.
Mais de l'autre côté, Mediapro risque de faire valoir que le championnat n'est pas ce qui lui a été vendu étant donné la crise sanitaire, d'autant qu'il risque de se voir ensuite demander des dommages et intérêts par les clubs. Il peut faire traîner l'affaire ou lancer une autre procédure en justice, pour pousser la Ligue à baisser son prix, d'autant qu'elle n'a pas forcément beaucoup d'alternatives pour les vendre au même prix si elle devait les récupérer. En revanche, si Mediapro se plaçait dans une procédure de liquidation ou de cessation des paiements, « la LFP aurait du mal à récupérer son dû », explique Pierre-Alain Bouhenic, avocat chez Brown Rudnick.
Cela dit, beaucoup pensent que si Mediapro a si rapidement demandé de nouvelles conditions, c'est qu'il veut renoncer rapidement et partir dans les meilleures conditions possible.